Pourquoi Airbnb aggrave la crise du logement

Pourquoi Airbnb aggrave la crise du logement (ln24.be) 

Pourquoi Airbnb aggrave la crise du logement – La Libre

Ce reportage a le mérite de lancer le débat sur les thématiques de l’hébergement touristique et du logement.  Il n’échappe malheureusement pas à la tentation démagogique d’opposer les 2 thématiques et il appelle à cet égard de nombreux commentaires :  

  1. Le reportage introduit le débat de façon sensationnelle avec la crise du logement et l’évolution graphique et irréaliste des loyers, générée outre l’inflation et l’évolution de la demande.  On pourrait tout de suite rétorquer : supprimez les 4.800 hébergements touristiques non hôteliers (ce dont certains rêvent) et quelle excuse allez-vous trouver pour justifier vos politiques de création de logement inefficaces ?  Nous vous renvoyons à cet effet à notre analyse chiffrée sur le logement et les ménages en attente de logements sociaux dans notre slider « Statements ».  Stop à la démagogie politique !      
  2. Le problème de la crise du logement se pose dans toutes les villes Européennes et du monde.  Les exemples de Paris et Barcelone sont également cités.  Nous renvoyons à l’analyse sur le nombre de résidences de tourisme enregistrées entre Barcelone et Bruxelles dans notre slider « Statements ».  Apparemment, Barcelone a trouvé un bien meilleur équilibre entre le touriste et l’habitant. 
  3. « Airbnb aggrave la crise du logement et s’enrichit ».  C’est une façon de voir les choses.  Pour rappel, Airbnb n’est pas le seul acteur.   Booking.com ou Expedia affichent des parts de marché significatives dans le secteur.  Mais au-delà de ces considérations, ces acteurs contribuent aussi activement au marché du tourisme en proposant aux citoyens du monde une offre alternative largement plébiscitée.  Le côté « demande » ne peut pas être ignoré – voir notre slider « Statements » quant aux chiffres de la Commission Européenne relatifs à cette demande.  
  4.  « La mise en location sur Airbnb pourrait me rapporter 2 fois plus qu’une location classique ».  Il convient de noter ici que l’on compare des pommes et des poires : les revenus d’une location de courte durée doivent en fait se voir en deux composantes : le revenu de la propriété et le revenu du travail.  Même si aucun service n’est offert par défaut dans une résidence de tourisme, la préparation de l’hébergement avant l’arrivée du locataire suivant (nettoyage, blanchisserie), la gestion des réservations et l’accueil du touriste sont des tâches qui génèrent une partie du revenu, mais engendrent des coûts également.  Pour les acteurs qui opèrent dans la « légalité » (ce qui est pratiquement impossible à Bruxelles), ils doivent encore payer leurs taxes sur les revenus et la taxe de séjour … Bref, bien évidemment que les revenus d’une location sont inversement proportionnels à la durée mais il convient d’être prudent dans les comparatifs ….  
  5. Il serait intéressant que le chercheur Hugo Périlleux détaille la façon dont il a pu calculer que 20 à 30% des logements dans le centre ville seraient « remplacés » par des hébergements touristiques non hôteliers.  Aussi, comment intègre-t’il le fait que certains quartiers sont moins propices à l’habitat résidentiel : qui souhaite habiter sur la Grand-Place ou dans des zones bruyantes à fortes densité d’Horeca ?  Ou bien que des maisons de commerce sont inhabitées aux étages ?Il faut trouver un équilibre, sans tomber dans le surtourisme évidemment, mais aussi sans tomber dans l’excès inverse et sacrifier le tourisme générateur de revenus considérables pour la Ville !  Tout un débat – qui nécessite de la nuance et de l’objectivité – et nous renvoyons à cet effet au post du Bourgmestre de la ville de Bruxelles Philippe Close dans notre slider.   
  6. Selon (au moment du reportage) l’Echevine de l’Urbanisme Madame Persoons, la protection du logement est un argument suffisant pour interdire la location d’une résidence de tourisme toute l’année à Bruxelles.  Nous renvoyons à notre slider « Statements » et notamment l’exemple donné par le Conseil d’Etat à Amsterdam ou la Cour de Justice de l’Union Européenne : un régime d’autorisation (ou d’interdiction) doit être justifié et proportionné !  Nous renvoyons aussi à l’introduction de notre « Carte Blanche » : 

      a. L’interdiction de l’activité économique de la résidence de tourisme n’est pas envisageable (ce serait illégal). 

      b. La résidence de tourisme remplit des rôles et des services incontestables, de sorte qu’il serait illusoire d’imaginer que ce « phénomène » viendrait à disparaître. 

      c. Il est préférable de réguler une activité que de l’interdire de manière détournée ou déguisée par des nombreuses normes réglementaires qui s’additionnent (ce qui encourage l’activité clandestine, non déclarée, au détriment de tous).

  1. Selon le journaliste, « ce marché clandestin vit aussi bien parce qu’il est entretenu par Airbnb ».   Soyons réalistes et honnêtes, dans les conditions actuelles, Airbnb a tout intérêt de ne pas divulguer trop de données en Région de Bruxelles-Capitale.  Et on peut alors s’interroger sur le fait qu’Airbnb communique ces mêmes informations dans d’autres villes europénnes.  La réglementation en vigueur y serait-elle plus proportionnée ?  Poser la question, c’est y répondre.   La proposition de régulation de la Commission Européenne devrait aider à mettre en place des règles proportionnées dans les Villes et Région des Etats Membres de l’Union Européenne.  Nous vous renvoyons à notre section Cadre Régulatoire. 
  2. Last but not least, la conclusion du chercheur Hugo Périlleux est interpellante : « les règles internes de concurrence de l’Union Européenne empêchent la régulation d’Airbnb ».  C’est justement tout le contraire et STR-Belgium soutient pleinement l’initiative de la Commission Européenne (voir section cadre régulatoire) dont l’objectif consiste à réguler le secteur de la résidence de tourisme, et justement d’empêcher les acteurs politiques locaux – à des fins électoralistes et/ou sous l’influence de lobbys divers – de mettre en place des règles non proportionnées qui pénalisent in fine tout un écosystème sous le prétexte que ces règles servent à atteindre d’autres objectifs, ni quantifiés, ni démontrés, et parfois pas même avoués.

STR-Belgium remercie le journaliste Emanuel Descours d’avoir lancé le débat et est disponible pour un débat télévisé sur le sujet avec l’ensemble des stakeholders.